CORED Guinée Équatoriale
(Coalitión de Opposition pour la Restauration d’un État Démocratique)
MANIFIESTE
Les partis politiques, mouvements et associations signataires de ce manifeste, mus par une action et un but commun qui nous conduisent à l’unité, ont décidé de devenir une plateforme politique de lutte pour un régime basé sur les libertés démocratiques en Guinée équatoriale.
À cette fin, sont exposés :
Raison de création de cette plateforme
Après analyse de la longue période de temps écoulée et la lutte politique stérile menée jusqu’ici, dans laquelle certains se sont consacrés à s’opposer à l’opposition tandis que d’autres ont été intégrés par le régime par la logique du ventre, les soussignés ont décidé d’unifier leur action politique et leurs voix, pour se constituer en un bloc unique d’opposition contre l’arbitraire du pouvoir d’Obiang et de son clan en Guinée équatoriale. Les signataires visent de cette façon à renforcer le poids de leur action politique auprès du peuple équato-guinéen et à l’international.
La lutte que cette plateforme souhaite déployer contre le régime Obiang et son clan est non-violente. Étant donné qu’Obiang et son clan interprètent l’action politique de l’opposition comme une volonté de partager ce dont ils jouissent de façon exclusive, sans rien offrir en retour, nous sommes clairvoyants sur le fait que parler d’une action politique non-violente contre l’anomie qui prévaut en Guinée équatoriale est pure chimère. Cependant, les signataires réaffirment leur volonté d’utiliser des méthodes non-violentes pour atteindre leurs objectifs politiques, qui ne sont autres que la mise en place d’un système politique démocratique en Guinée équatoriale.
CONTEXTE
Pour aboutir à la création de cette plateforme, nous avons suivi l’analyse suivante:
1 ) D’où venons-nous ?
La Guinée équatoriale avant le 12 Octobre 1968, était une colonie espagnole du golfe de Guinée ; autrement dit, un territoire et un peuple soumis à un arbitraire politique, social, culturel et économique. Nous étions un peuple, dans de très rares cas diplômé, sans capacité d’agir. Dans cette situation, quelques citoyens patriotes se sont organisés, considérant que les biens le plus précieux de tous les êtres humains sont la vie et la liberté, et ont décidé de se soulever contre le pouvoir colonial pour exiger l’indépendance. La première bataille a été rude, ce n’était pas nouveau. Nous savions que le colonialisme utiliserait toutes les armes dans cette lutte pour rendre notre indépendance impossible puis pour la faire avorter, une fois obtenue. Dans la lutte pour l’indépendance, beaucoup de nos compatriotes remarquables ont été assassinés : sans viser à l’exhaustivité, on peut citer Acacio Mañe Ela, Salvador Ndong Ekang et Enrique Nvo Okenve. C’étaient ceux qui avaient essayé de poursuivre ce chemin de lutte pour la liberté et la dignité de notre peuple qu’avaient initié certains patriarches et rois de différentes tribus et groupes ethniques de la Guinée équatoriale.
Comme le cours de l’histoire est irréversible, quand est venu le temps de nous octroyer l’indépendance, qui, d’une certaine façon, était l’issue inéluctable d’un processus de maturation, notre peuple, toujours marqué par les blessures dues au colonialisme, a confié son destin au premier démagogue populiste qui le lui demanda, promettant de venger les crimes coloniaux : Francisco Macias, qui a commencé une politique de la terre brûlée.
Quatre mois après le début de l’indépendance, à savoir les 5 Mars 1969, Macias et sa bande ont pris le pouvoir, établissant une dictature qui anéantit toutes les libertés pour lesquelles notre peuple avait combattu. L’arbitraire est devenu l’essence de l’action politique.
2) Où nous en sommes
Dix longues années après cette prise de pouvoir, il y a eu le coup d’Etat militaire dirigé par l’actuel président de la République de Guinée équatoriale, qui revient au changement pour ne rien changer ; le pouvoir ayant besoin d’en contrôler tous les leviers pour éviter une chute réelle. La différence avec la période précédente est que les dictateurs se sont enrichis tout en continuant à asseoir de façon autocratique leur pouvoir sur le peuple. Aussi, aujourd’hui, la Guinée équatoriale subit une dictature depuis plus de 44 ans, durant lesquelles des promesses ont été faites sous la pression internationale, mais n’ont absolument pas été tenues. La situation dans le pays a continué de se détériorer, les droits de l’homme ont continué à être laminés et le peuple s’est vu refuser la possibilité de participer à des élections libres et démocratiques. A l’intérieur du pays, l’opposition a été assimilée au régime à travers le clientélisme politique ou réduite à la clandestinité du fait de la répression. A l’extérieur du pays, l’opposition, manquant de moyens, de projets et de leadership, croupit en exil. Sans possibilité de créer une alternative politique au régime Obiang. S’opposant à l’opposition. La situation de la Guinée équatoriale est risible : quand les observateurs du Parlement espagnol vont en Guinée équatoriale pour observer le processus électoral, ils ne le font pas pour contrôler la transparence du processus, mais pour négocier avec le président Obiang le quota de députés qu’il est prêt à accorder à l’opposition. Une opposition transformée en pure figuration.
Pour étouffer toute dissidence interne, elle est intégrée dans l’administration, laissant chacun pratiquer le pillage des caisses de l’Etat, en son âme et conscience. De cette façon, la corruption et la criminalité sont récompensées, et font le lit de la dictature. Et pour mieux dominer le peuple, celui-ci est maintenu dans la pauvreté et l’ignorance.
3) Là où nous voulons aller
Nous croyons en notre peuple et en notre nation. Nous savons qu’avec nos énormes ressources économiques et notre capital humain, nous pouvons élever au sein de l’Afrique une nation exemplaire, une nation modèle. Un pays dans lequel les citoyens et citoyennes équato-guinéens vivront en sécurité et prospéreront librement. Nous pensons que nous pouvons passer en toute sécurité d’un Etat de peuples et de tribus à un état de citoyens, à travers la primauté du droit, qui est ce qui unit tous les citoyens.
D’où la création de cette plateforme, dont l’action va nous conduire à l’unité. Nous avons renoncé à l’usage de la violence pour atteindre nos objectifs politiques, même si nous sommes confrontés à une situation politique essentiellement violente. Nous savons qu’il n’est pas facile de faire en sorte qu’une dictature négocie sa démission du pouvoir. D’autant que les dictatures utilisent le pouvoir comme un abri, pour maintenir l’impunité de leur arbitraire. Mais nous savons aussi qu’avec l’intelligence, en créant une opposition compacte, avec un leadership clair, qui soit du moins un porte-parole vis-à-vis d’autres pays et d’organisations internationales qui voudront nous soutenir, nous pourrons obtenir la dissolution de la dictature, une dissolution qui servira de terreau pour la naissance d’un régime démocratique en Guinée équatoriale.
Par conséquent, les signataires de ce manifeste appellent les autres formations politiques guinéo-équatoriennes à se joindre à eux, afin de créer une alternative politique sérieuse contre la dictature.